À l’initiative de Charlotte Pringuey Cessac
Exposition collective
Projet NOMADE
Exposition 2021, passée
Du 03 février au 5 mars 2021
Vernissage le vendredi 2 février à 18h.
Charlotte Pringuey Cessac invite 18 artistes à réaliser une pièce en lien avec le voyage, la rencontre, la transmission. De taille suffisamment petite pour intégrer l’espace de la boîte à gants, cette pièce doit être manipulable pour être activée par des passagers que Charlotte rencontre sur sa route. Elle réalise un trajet se rendant d’un atelier d’artiste à un autre à bord de sa voiture et enregistre les réactions des passagers.
Avec les artistes : Simone Simon (Cagnes-sur-Mer), Catherine Burki (Marseille), Caroline Bouissou (Catalogne), Laura Giordanengo (Toulouse), Nicolas Daubanes (en résidence à Pollen/Montflanquin), Florian de la Salle (Poitiers), Manon Rolland (Nantes), Daniel Nadaud (Laval), Maëlle Labussiere (Maison-Alfort), Albane Hupin (Rouen), Vincent Chenut (Bruxelles), Alban Morin (Saint Etienne), Gabrielle Conilh de Beyssac et Jules Guissart (Pont-de-Barret), Marco Godinho (Luxembourg), Massimiliano Baldassarri (Neuchâtel), Anne-Laure Wuillai (Nice), Olivia Barisano (Vallauris), et Charlotte Pringuey-Cessac (en résidence au METAXU/Toulon)
Vue de l’exposition collective Projet NOMADE , Charlotte Pringuey Cessac 2021, Photo © François Fernandez
avec l’artiste Charlotte Pringuey Cessac
Cette question n’est simple qu’en apparence. Elle donne à chaque participant l’occasion de se projeter dans un passé enfoui au plus profond de sa mémoire. »Vincent Chenut, Protocole Projet NOMADE, Interprétation du trajet quotidien pour se rendre à l’atelier, 2021
« Imaginé à partir du trajet qu’il réalise quotidiennement de son domicile à son atelier. Déplacement dans l’espace urbain pour un déplacement dans la feuille colorée. »
Projet NOMADE
Le mot n’est pas la chose, le réel se soustrait à sa représentation de même que « la carte n’est pas le territoire » ainsi que le proclamait Alfred Korzylski. Et si l’art n’est pas la vie, la carte peut- elle au moins définir les tracés de ces errances auxquelles les artistes s’adonnent autour du projet NOMADE de Charlotte Pringuey-Cessac. Celui-ci est exemplaire d’une démarche qui privilégie l’itinérance, l’expérimentation et le partage à la simple réalisation de l’œuvre, de son achèvement et de la sacralisation qui en résulte. Elle s’élabore au fil d’un long processus où temps et espace s’entremêlent, dans l’incertitude des rencontres, au hasard du quotidien, si bien que plutôt que de s’amarrer à une résidence dans l’Espace d’Art METAXU à Toulon, l’artiste préféra une résidence nomade qui l’entraîna durant un mois dans un tour de France à bord de sa voiture où elle glissa dans l’étagère au-dessus de sa boite à gants des mouchoirs en porcelaine. L’enjeu consista alors à les échanger d’un lieu à l’autre avec 18 autres artistes pour des œuvres qui tiendraient dans un espace aussi réduit. Et comme Charlotte Pringuey-Cessac transportait à chaque fois de nouveaux passagers, ces œuvres devenaient l’objet d’une médiation, elles s’inséraient dans le flux d’une parole, dans la transformation du sens, dans une figuration de la fragilité et de l’éphémère.
L’infime se noue alors à l’intime tant tout projet résulte d’un cheminement personnel mais aussi d’un ensemencement pour une récolte incertaine et un partage. Le projet est aussi ce trajet. Et il impliquera dès lors un déplacement, un instant de qualité humaine dans la rencontre de l’autre et la solidarité. L’œuvre aboutie en est le témoignage et chaque artiste ajoute sa modeste pierre à cette œuvre commune. Quelle est la valeur d’usage de l’art ? Et si elle correspondait à une valeur d’échange autre que celle qui définit d’ordinaire nos rapports sociaux ? C’est aussi dans cette perspective que s’inscrivent les recherches de l’artiste quand elle se mesure à la polyphonie des autres créations, au dialogue et au jugement de ceux qui les approchent.
Souvent attachée à la notion de durabilité, l’œuvre exprime pourtant un état ponctuel du monde. Elle est un présent continu qui énonce des potentialités humaines et sociales. L’éphémère conditionne ses formes en devenir. Aussi pour l’ensemble des artistes convoqués, le temps avec les séquences qui l’imprègnent reflète-t-il cette itinérance. Ce sont alors les moments impensés du quotidien, la répétition, la banalité dans les travaux de Manon Rolland ou bien les cartes postales empruntes d’une méditation sur la mémoire avec Caroline Bouissou. Simone Simon quant à elle ravive l’intensité ou l’effacement des souvenirs par des enregistrements sonores tandis que Nicolas Daubanes déclare : « Mon travail s’inscrit dans la durée, il dessine un chemin, une trajectoire qui tend vers la recherche de la liberté. »
Le temps demeure la matière mystérieuse de cet ensemble d’œuvres toujours modestes mais résolument incrustées dans l’humain et la puissance émotionnelle. L’itinéraire est une chaîne fragmentée. Il renvoie des parcelles d’objets ou de mots comme les traces d’un passage dans la vie et chaque étape charrie l’humble instant d’un morceau d’existence qui se transforme en poésie. La traversée du temps est la quête de cet espace où se joue l’aventure de l’art.
Michel Gathier, 2021